Cassons les sondages avant qu’ils ne détruisent la démocratie.

Le recours aux sondages est aujourd’hui une pratique courante des journalistes. Souvent contradictoires, ils sont sensés témoigner des idées de « l’opinion » à un moment donné sur un sujet particulier ou sur la cote de popularité d’un individu. Les périodes électorales sont celle où la production sondagière est la plus forte. Or déjà dénoncée par Pierre Bourdieu en 1972, cette pratique  se voulant objective n’est en réalité pas neutre politiquement, voire même apparaît dangereuse pour notre démocratie.

Les sondages sont d’abord une somme d’imperfections techniques. Cela m’étonne que certains y croient encore tant les erreurs des sondages ont été grossières ces dernières années. Pour l’élection présidentielle de 1995 Balladur était « ultra favoris », c’est finalement Chirac qui l’a emporté, en 2002 personne n’imaginait se retrouver avec Le Pen au second tour et en 2005 le « non » aurait du, si l’on en croit les prévisions, être écrasé par le « oui » au référendum sur le Traité constitutionnel européen (il fut en revanche écrasé médiatiquement). Plus récemment, aucun sondage n’avait prévu le score relativement élevé d’Arnaud Montebourg à la primaire du Parti socialiste. Des raisons techniques expliquent cette imprécision. Pour réduire les couts, les échantillons, sensés représentés l’ensemble des composantes du corps électoral, sont de plus en plus réduits et cela entraine par ce fait une augmentation des marges d’erreur. La sélection par quotas en fonction de critères particuliers se traduit concrètement par une sous représentation des classes populaires. Enfin pour lutter contre les non-réponses les « instituts » de sondage vont faire des « redressements », c’est à dire augmenter un chiffre qu’ils jugent trop faible par rapport à leurs intuitions (c’est le cas très souvent avec le Front National).

Si les entreprises qui vendent des sondages aux médias se revendiquent comme des instituts cela est une duperie. En effet, elles vont chercher à se donner une légitimité institutionnelle voire scientifique en utilisant le terme « institut » alors que nous avons à faire à de véritables entreprises pour lesquelles la rigueur scientifique n’est que le cadet de leurs soucis. Dans un marché aussi concurrentiel que celui des sondages ce n’est pas la pertinence d’un résultat qui fait la une, mais le spectaculaire ! Les entreprises sondagières vont donc chercher à favoriser le sensationnel contre toute réflexion de fond. Il aussi nécessaire de comprendre que pour ces entreprises spécialisées dans la communication les sondages d’opinion ne sont que des produits d’appels, visant à leur assurer une publicité. Leurs véritables sources de revenus étant les études de marchés réalisées pour d’autres entreprises. Dans la société du spectacle le sondage n’est qu’un produit commercial comme un autre.

Mais le sondage peut aussi apparaître comme un instrument au service des puissants, de l’oligarchie. Il est intéressant de regarder qui sont les propriétaires des instituts de sondages. Par exemple, l’institut CSA est détenu par le grand ami du président des riches Vincent Bolloré. L’institut IPSOS pour sa part possède au ¾ de la valeur de son capital, la présidente des casseurs de droits sociaux, Laurence Parisot. Or, ces individus, membre de « l’oligarchie triomphante »,  affirment clairement leurs idéologies néolibérales. Sous l’apparente neutralité c’est tout un système de manipulation de l’opinion qui est mis en place. D’autre part, la nécessité de pouvoir traiter l’information rapidement (et si possible avec l’aide d’ordinateur) interdit les « réponses ouvertes » et agit sur la forme des questions. Or en orientant une question de telle ou telle façon il est possible d’obtenir la réponse que l’on souhaite obtenir. D’autre part, en forçant une réponse qui n’apparaît pas naturelle pour l’individu au premier regard on force l’opinion à se construire d’elle même. En annonçant un évènement on finit par le faire se produire. C’est le concept de la prophétie auto réalisatrice bien connue des sociologues et c’est ce à quoi on nous pousse pour nous empêcher de décider par réflexion personnelle (en légitimant certains candidats ou idées plutôt que d’autres).

Nous devons faire preuve d’une vigilance citoyenne à toute épreuve pour lutter contre toutes les formes de manipulation. Pour cela il est nécessaire de faire la lumière sur les méthodes et les objectifs de cette Société sondagière d’autant plus que les manœuvres deviennent de plus en plus grossières. Lundi 9 janvier, le quotidien Libération, en titrant, après avoir considéré les « probablement pas » comme des « oui »,  que 30% de la population pourrait voter Le Pen, nous voyons que l’attention est de mise ainsi que le travail à réaliser important pour déconstruire le mythe de l’objectivité des sondages.

Ne ratez pas mercredi 25 janvier 2012 à 16h45. à l’Université d’Evry Val d’Essonne une conférence de Richard Brousse, co-auteur avec Alain Garrigou de l’ouvrage « Manuel anti-sondage, La démocratie n’est pas à vendre », organisée par l’association UFR0, association d’éducation populaire sur l’Université d’Evry.


Jouons un rôle dans l’histoire

Nous vivons un moment d’histoire, les crises économiques et écologiques qui se succèdent nous plongent toujours plus profondément dans ce que l’économiste Jacques Généreux appelle « La Grande Régression ». Grande Régression par rapport aux avancées sociales portées par le Conseil National de la Résistance durant la Seconde Guerre mondiale puis  « acquises » par les travailleurs durant les « trente-glorieuses ». Il est hors de question de vouloir idéaliser cette période qui a contribué à l‘utilisation massive des ressources naturelles de la planète mais plutôt de la prendre comme modèle pour reproduire cette dynamique sociétale dans le but d’aller vers une société de progrès humain.

Aujourd’hui seul le Front de gauche apparaît en mesure de répondre à ce moment d’histoire particulier en proposant une véritable politique de rupture. La France a la chance en cette d’année 2012 d’avoir un événement politique national majeur (les élections présidentielle et législatives) pour lequel chacun des citoyens doit pouvoir décider de ce qu’ils souhaitent comme société future. En effet, nous pouvons renverser le rapport de force et combattre le capitalisme, qui a fait la preuve de sa capacité à détruire tout ce qu’il touche, par un acte citoyen : le vote. Or, je n’ai malheureusement pas l’impression que les autres forces politiques du pays aient conscience de cet enjeu.

A l’intérieur de la gauche (Front de gauche mis à part), nous avons d’un coté l’extrême gauche qui se contente de candidatures de témoignages et de l’autre le Parti socialiste qui s’enfonce dans un renoncement de toute politique radicale de transformation sociale. Les appels du pied à François Bayrou et les refus de revenir sur la retraite à 60 ans et sur la suppression de postes dans la fonction publique (et ce malgré les disfonctionnements que nous vivons tous) montrent que la politique mise en place par Sarkozy et son gouvernement est finalement « la seule possible ».

François Hollande et la droite partagent la même vision sociétale : on ne change rien et on s’adapte aux volontés des marchés financiers. Pour faire plaisir à ces derniers les libéraux et socio-libéraux n’ont qu’un mot à la bouche : austérité. L’austérité se traduit par une volonté de réduire le déficit à 0% du PIB (la fameuse règle d’or) par la compression des dépenses publiques, en oubliant qu’il est possible d’augmenter les recettes par la taxation des revenus du capital ou par l’instauration d’un revenu maximum par exemple. Cette politique, aussi idiote qu’inutile, exclue le peuple du processus de décision et cause la ruine de pays de plus en plus nombreux dont la Grèce en est l’exemple le plus marquant. La mise en place des différents plans de rigueur en contrepartie des plans de « sauvetage » de l’UE et du FMI a continuellement augmenté son déficit par la contraction de son économie.

Cette politique est une véritable politique de classe qui favorise l’oligarchie financière contre les travailleurs productifs et il faut le faire savoir ! Nous avons par exemple, mes camarades et moi avec l’association UFR0, animé au mois de novembre dernier à l’Université d’Evry, une projection du film Debtocracy retraçant l’histoire de la « crise grecque » (visible librement sur internet) suivie d’un débat sur le thème de la légitimité de la dette publique. De la même manière le petit clip « la Dette c’est chouette » (http://vimeo.com/33392696) réalisé par l’équipe du Front de gauche, est une façon de faire de l’éducation populaire. Aujourd’hui, trop de personnes se sentent étranger(e)s vis à vis du discours politique et nous avons la responsabilité de trouver de nouvelles méthodes pour les toucher.

C’est aussi ça « l’Humain d’abord », trouver les moyens de l’implication populaire la plus large contre les décisions dictatoriales de la finance, pour que l’économie soit au service des femmes et des hommes et non l’inverse. Car si nous, militants du Front de gauche, sommes conscient que les réponses que nous apportons sont les plus efficaces pour l’intérêt général, il nous reste à les faires approprier par l’ensemble de la population pour qu’en 2012, le changement passe par les urnes.

Jouons un rôle dans l’histoire, c’est notre responsabilité.